La tourista

Il a quitté Paris heureux, prêt a surfer les dunes les plus hautes, dérive de folie les deux pieds sur les cales pieds, guidonnage, contre-braquage , sable mou et saignées ;GPS et étoile du berger. Puis refaire le monde en partageant un thé a la menthe et une CAMEL avec les bergers qui viendront admirer sa moto devant la petite mare d’eau, à l’ombre des ces 3 palmiers, idyllique endroit. Il a soif …..Oasis/Oasis !.
Il va se retrouver le cul a l’air en plein vent de sable, le ventre noué par les spasmes, épuisé à l’idée d’avoir à relever cette putain de moto que le vent a fait tomber en plein dans les déjections de ses vomissements. Il va pourrir sa mère qui n’a mis dans le sac à dos que 3 rouleaux de PQ. Heureusement, il lui reste un vieux t-shirt de moto protégé du sable ; il fera l’affaire…pour cette fois.
Il a attrapé la tourista, pathologie banale dans la grande majorité des cas, qui touche nos pauvres organismes occidentaux très ( trop ) protégés des microbes.

Impitoyables statistiques, plus il fait chaud ,plus vous êtes jeunes, riches, plus vous cherchez a vous rapprocher des autochtones, bref plus vous vous comportez comme le raider moto que vous êtes tous, plus vous risquez cette maladie aux divers doux noms poétiques ; la course de rome, la course de tokyo, la course turque, la course du voyageur, la bali bali, la danse aztèque, le galop grec, le ventre égyptien, les boyaux d’adan, la complainte de l’été, le vomi cakar
Et ne cherchez pas a la contourner en roulant propre, tous les pays où il est sympa de rouler à moto sont concernés ; là ou il n’y a pas de béton ni de goudron, il y a la tourista, avec un soupçon de réserve toutefois…..il reste l’Alaska…….mais là, il y a des ours blancs.
Afrique, Amérique du sud, Moyen et Extrême Orient, Inde, etc…. A part les Etats Unis, le Canada, l’Australie et l’Europe occidentale du nord difficile d’y échapper .

En quelques heures, une chape de plomb vous tombe sur le dos, les bottes sont lourdes, mal au ventre, fatigue, transpiration, nausées, et finalement une impérieuse envie d’aller aux toilettes, parfois de vomir. Des selles très liquides … 3 à 10 par jour et toujours ces spasmes dans le ventre.
Vous n’avez qu’une envie….vous poser en chien de fusil et ne plus bouger. Et cette fatigue qui vous empêche d’agir…le simple fait de penser à kicker votre moto vous épuise par avance.
Mais je fais quoi ici….c’est quand qu’on rentre ????

Rassurez le, en 3 à 5 jours il sera sur pieds,avec quelques kg de moins et prêt à attaquer de plus belle.

QUE FAIRE POUR EVITER D’ETRE MALADE ? TRAITEMENT PREVENTIF
La tourista est en fait une réaction de notre organisme au contact d’un microbe. Si le plus souvent il s’agit d’un colibacille, on retrouve aussi parfois des salmonelles, des gardiases, des shigelles et un rotavirus dans 10% des cas. Tous ces microbes sont des germes à élimination digestive. Il faut donc s’en protéger par une hygiène très rigoureuse. C’est ce que l’on appelle le péril fécal ou la maladie des mains sales.
Alors bien sur, la médecine a une réponse standardisée, très efficace : se laver les mains après chaque contact, ne boire que des boissons provenant d’une bouteille encapsulée vierge, ne pas manger de fruits crus non pelés, peles par vous, avec des mains propres, pas de glace ni de glaçon, manger très cuit, jamais de crudités, éviter viandes et poissons pas assez cuit à l’intérieur, manger plutôt des légumes et surtout du riz. Se brosser les dents puis se rincer avec de l’eau en bouteille…….que d’excellents conseils totalement applicables par le tourisme de luxe se déplaçant en car climatisé d’un Hilton à l’autre et ne touchant les habitants que du bout de son Nikon , et encore.
Le raider motard qui va s’arrêter sur la place de ce petit village pittoresque, goutter les figues bien mures que ce gamin lui offrira toutes ouvertes et se désaltérera à cette fontaine si tentante, aura bien du mal à éviter la contamination par ces germes.

Alors que faire….essayer de passer entre les gouttes en adaptant les règles hygiénodiététiques à nos habitudes de motard. Eviter de laisser traîner vos mains partout, de tout toucher. Fuyez les endroits plein de mouches et les toilettes des lieux publics. Ne pas boire n’importe où et n’importe quoi ,on trouve hélas du Coca Cola partout, et l’on peut utiliser les petits sachets de lingettes désinfectantes qui ne prennent pas de place dans la poche. Ne manger ni fruits crus ni crudités. Les fruits seront pelés après nettoyage à la lingette. On mangera des plats locaux très cuits, du poulet de préférence à la viande, avec du pain ; si possible, amener un jeu de couvert de camping que l’on sortira discrètement au restaurant. Bien entendu, pas de glaçon, on boit à la bouteille et pas de crème glacée, les laitages sont de merveilleux bouillons de culture. En cas de petite faim, des barres énergétiques à partager avec un gamin feront très bien l’affaire pour pouvoir refuser le fruit suspect que l’on vous propose sans pour autant offenser.
En théorie, des études montrent que l’on pourrait eviter la tourista en prenant certains antibiotiques à titre préventif, c’est la chimioprophylaxie. Mais les médecins vont vous le déconseiller pour 3 raisons : la mauvaise tolérance des médicaments ( nausées et mal au ventre ) et les effets secondaires dangereux ( photosensibilisation au soleil et risque de rupture tendineuse ). Enfin, en pratiquant ainsi, les microbes vont devenir résistants aux antibiotiques.
Néanmoins, dans certains rares contextes précis ( court séjour, épidémie, tout un groupe malade sauf vous ) et avec un accord médical, on peut envisager la mise sous antibiotique préventive. Une cycline, du BACTRIM ou mieux une quinolone pourront alors être choisis en vous méfiant des effets secondaires ( garder son casque et ses gants au soleil ) et en ajoutant un pansement gastrique pour les maux d’estomac qui vont sans doute apparaître.

COMMENT VOUS SOIGNER SI VOUS L’AVEZ ATTRAPE. LES TRAITEMENTS CURATIFS

Le principal danger de la tourista serait une éventuelle déshydratation ; entre vomissements, selles liquides et la chaleur qui fait transpirer, on risque alors une chute de tension et une perte de connaissance.
Sans commune mesure avec la très grave déshydratation du cholera, la déshydratation de la tourista doit être traitée ; il faut boire et boire encore ; là, chacun a sa recette : le classique coca cola qui apporte de l’eau et du sucre, le thé ou mieux encore, le riz blanc avec son eau de cuisson ; ce liquide visqueux riche en amidon que l’on pourra saler légèrement fera merveille ; c’est pour cela que je préconise de mettre dans le sac à dos des sachets de riz à cuisson rapide. Boire cette soupe de riz 3 fois par jour ; avec 1 litre de coca et du thé.
Une bonne hydratation et du repos sont médicalement suffisant ; tout va rentrer spontanément dans l’ordre en 3 à 5 jours. On peut ajouter un peu de paracétamol en cas de fièvre et du TIORFAN si la diarrhée persiste ; les antiseptiques intestinaux type ERCEFURYL, très utilisés, n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité. Les médecins ne les conseillent donc pas.
Mais pour les ‘’roule toujours’’ ou sur un rallye où il est parfois difficile, voire impossible de lâcher le groupe, je reste alors partisan, dans ce contexte, d’un traitement relativement incisif. Pendant 3 jours, vous ne ferez pas le meilleur temps, vous subirez le terrain, mais vous pourrez rester au sein du groupe.
Traitement spécial compétition pendant 3 jours.
Un pansement gastrique chaque 2 h
Un antidiarrhéique type TIORFAN 3 fois/jour
Un antibiotique type quinolone, 2 fois/jour
Un antispasmodique puissant (personnellement, je me fais faire une intraveineuse de VISCERALGINE 15 minutes avant le départ ) très efficace contre les spasmes intestinaux qui vous coupent en deux .
1g de paracétamol chaque 6h en cas de température
Ce traitement sera prescrit par le médecin du rallye ou avec l’accord de votre médecin avant de partir ; cela paraît très simple mais ne jouez pas à l’apprenti sorcier ; prenez un avis médical si vous voulez absolument vous traiter pour continuer à rouler.

Bonne bourre et attention aux microbes et aux saignées qui font tomber !

Docteur Patrick MÜLLER, Mazamet 81200



Association loi 1901 AMIS : « Assistance Médicale Inter Sport » 06.61.22.87.46 - Dr Jérôme FEUILLADE : scmn.maurin@yahoo.fr
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