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Mal de dos : le lumbago (2e partie)
Dr Jean-Cyril PONCET
Rhumatologue, Médecin du Sport, Ostéopathe
www.amis.asso.fr
Un lumbago survient lors d’un faux mouvement. Certes, on peut se faire mal au dos de manière glorieuse, en arrachant sa moto d’un bourbier infernal, devant une flopée de journalistes… mais la réalité est généralement autre. C’est souvent dans des situations modestes : par exemple, lors d’une grasse matinée. Tu te redresses pour fermer un tiroir. Tu ressens une douleur fulgurante, entre deux vertèbres. Tu te retrouves bloqué.
Qu’est-ce qui vient de se passer ? Une articulation postérieure se ferme trop vite, avant que la synoviale (l’équivalent d’un soufflet d’étanchéité de l’articulation) ne se soit retirée, et la coince. La contracture réflexe autour de l’articulation aggrave son pincement et entretien le blocage. Pourquoi ? Ta mécanique personnelle est froide et tu ne fais pas attention aux classiques consignes d’ergonomie que tout travailleur de force connaît intuitivement : verrouiller le dos « droit », fesses en arrière, et soulever avec les genoux.
Comment traiter le lumbago ?
Les drapeaux rouges
1. S’assurer, tout d’abord, qu’il s’agit bien d’un lumbago
Ce n’est pas une lapalissade. Ce n’est pas parce que les blocages mécaniques sont fréquents que toute douleur en provienne systématiquement. Celui qui a déjà eu une colique néphrétique se souvient d’une douleur qui part juste sous les côtes, à côté de la colonne vertébrale, et qui part en demi ceinture jusqu’aux testicules. Mais une autre personne qui se coince les 2 premières vertèbres lombaires aura une douleur de trajet identique par irritation du nerf abdomino-génital (nommé dans les temps reculés nerf honteux, où la médecine confondait anatomie et « moralité »…). La différence entre les 2 cas : celui qui a une colique néphrétique ne peut se coucher, a une douleur à « dormir debout », alors que l’autre, bien calé, sera calmé par le repos.
En résumé, tout patient doit être examiné. Et toute douleur qui réveille la nuit, ou qui s’accompagne de fièvre, frissons, voire d’un petit amaigrissement, d’une simple perte de l’appétit, doit passer au bilan. C’est ce qu’on appelle les « red flags » ou « drapeaux rouges ». On doit éliminer, de principe, les douleurs projetées, les infections, les cancers.
Le cocktail de médicaments
2. Traiter la douleur
Tout le monde connaît les antalgiques. Ils ne coupent que le signal douloureux, et ne guérissent en aucun cas la cause de la douleur. Cela dit, ils sont utiles, et l’on peut intensifier le traitement de base (paracétamol : Dafalgan®, Efferalgan®, Doliprane®) par un recours aux dérivés morphiniques, voire à de la morphine pure.
Les anti-inflammatoires diminuent la réaction intra-articulaire. En l’absence de prise en charge que nous décrivons dans les 2 prochains paragraphes, ils sont utiles en cure courte (3 à 5 jours). Agressifs pour l’estomac, ils seront pris au milieu des repas.
3. Traiter les muscles
Il existe des décontractants musculaires. En traitement d’appoint, ils ne permettent pas totalement le relâchement des muscles, ces derniers obéissant à l’ordre neurologique de la moelle épinière. Ces médicaments sont limités par leurs effets secondaires : soit de la somnolence, soit de la diarrhée…
La chaleur permet une petite détente. Les massages aussi. Malheureusement, leur effet est limité dans le temps, entre 20 minutes et 6 heures… En dehors du pétrissage musculaire, le massage a une autre vertu : en stimulant la peau, il ralentit la perception de la douleur par la moelle épinière. Véridique ! Nous sommes de grands enfants, et avant de tomber en moto, nous faisions la même chose en vélo. Que faisions-nous en nous relevant ? On se frottait intuitivement la peau à coté des éraflures ! C’est pourquoi les kinésithérapeutes stimulent la peau avec un boîtier électrique.
L’ostéopathie
4. Traiter le blocage articulaire
C’est le grand succès de l’ostéopathie. J’entends souvent : « Quoi ! Un rhumatologue qui parle d’ostéopathie, cette médecine parallèle ? »
Savez-vous qui a inventé l’ostéopathie ? Un chirurgien nordiste : Andrew Taylor STILL, qui fit la guerre de Sécession, puis fonda en 1882 l’American School of Osteopathy.
Qu’est-ce que l’ostéopathie ?
C’est la recherche et le traitement des diminutions de mobilité articulaire ou tissulaire, comme notre lumbago. Il existe différentes techniques :
La plus connue s’appelle structurelle, avec le fameux craquement lorsqu’on libère le blocage. L’ostéopathe repère avec ses doigts les 2 vertèbres bloquées. Cela ne se voit généralement pas sur les radiographies, mais il est conseillé de les faire faire avant toute manipulation. L’ostéopathe va te vriller dans des postures particulières, afin de mettre en butée toutes les articulations sus et sous-jacentes. Cela va permettre de concentrer l’énergie sur le lumbago. N’aie pas peur, une petite impulsion suffit. Car on utilise en plus la détente automatique des muscles en te faisant expirer. Et… ça passe tout seul (bon, il existe des brutes partout…), souvent avec un petit craquement.
À quoi correspond ce bruit ? À la dépression brutale qu’on crée dans le liquide articulaire et qui forme une bulle de gaz. Ce que les sous-mariniers appellent les bruits de cavitation… La libération de l’articulation, donc l’amélioration, est donc rapide !
Encore plus douces, d’autres techniques ostéopathiques sont dénuées de craquements : avec ses mains, le thérapeute libère l’énergie bloquée dans les tissus. Elles sont appelées justement ostéopathie tissulaire, ostéopathie crânienne…
À suivre…